Dans son édito du lundi, Emmanuel Massicard signe un plaidoyer pour un profond aggiornamento du rugby féminin français. À la suite de l’échec des Bleues lors de la Coupe du monde féminine disputée en Angleterre, l’éditorialiste appelle à une « révolution » : non pas un coup de balai précipité, mais une refonte méthodique d’un modèle arrivé en bout de course. Derrière l’émotion du moment se dessine une conviction forte : pour que l’équipe de France féminine retrouve de l’allant, il faut revoir la manière dont elle se prépare, se structure et se projette.
Pourquoi parler de « révolution » chez les Bleues ?
Le mot s’impose face au constat: les promesses n’ont pas été tenues au plus haut niveau et les écarts se creusent face aux meilleures nations. La désillusion anglaise n’est pas qu’un accident; elle révèle des limites systémiques qui touchent à la formation, à l’exigence du quotidien et à l’alignement entre ambition fédérale, clubs et joueuses. L’édito invite à rompre avec les habitudes, à questionner les certitudes et à travailler autrement.
Urgences identifiées pour l’équipe de France féminine
- Clarifier la philosophie de jeu : définir un cadre de performance lisible, adapté aux qualités des joueuses, et porté par un staff fédérateur.
- Hisser l’exigence physique : optimiser la préparation athlétique, la prévention des blessures et la récupération afin de soutenir des intensités internationales.
- Professionnaliser plus largement : mieux encadrer le temps de travail, les suivis médicaux et l’accompagnement socio-professionnel pour stabiliser les trajectoires.
- Renforcer la formation et la détection : fluidifier les passerelles entre pôles, clubs et sélection, tout en diversifiant les profils détectés.
- Accorder les calendriers : éviter les chevauchements pénalisants entre championnat et fenêtres internationales, garantir des blocs de préparation cohérents.
Un modèle à réinventer, du terrain à la gouvernance
La « révolution » invoquée tient autant à l’organisation qu’au jeu. Elle suppose de donner plus de moyens aux clubs formateurs, d’accompagner l’élévation du niveau de l’élite domestique et de favoriser une culture de performance partagée. Elle demande aussi un pilotage fédéral clair, capable d’anticiper, d’évaluer et d’ajuster sans s’enfermer dans le court-termisme.
Des pistes concrètes pour relancer les Bleues
- Instaurer des cycles de travail pluriannuels avec des objectifs intermédiaires mesurables.
- Standardiser des référentiels techniques et physiques communs à toutes les sélections.
- Structurer des camps de performance réguliers pour élargir la concurrence au sein du groupe.
- Valoriser l’analyse vidéo et la data pour objectiver les choix, du plan de jeu à la gestion des charges.
- Renforcer la coopération clubs-sélection autour de feuilles de route individualisées.
Retrouver un cap et une identité
Au-delà des ajustements tactiques, l’enjeu est d’installer une identité forte, reconnaissable, capable de résister à la pression des grands rendez-vous. C’est tout le sens de l’appel d’Emmanuel Massicard: marier ambition et lucidité, replacer les joueuses au centre du projet et faire des Bleues une équipe qui avance, apprend et s’améliore. La déception anglaise peut devenir un point d’inflexion. À condition d’assumer, d’oser et de bâtir – dès maintenant.